Brouillons de pensées

Journal d'un mardi soir

23:56 – prise d'un tiers. Chronomètre lancé. Tâche pour attendre la montée : relecture globale. À partir de ce moment, les instants seront référencés de manières relative. NB : ivre.

[+03:12] Hoquet. Désagréable. Tentative d'arrêt de respiration pour pallier cela. Musique : Blut Aus Nord – MORT.

[+05:33] Préparation de Spektr – Et Fugit Irreparabile Tempus comme prochaine écoute.

[+08:10] j'hésite à prendre directement le reste du carton. Quitte à réaliser une expérience, autant la conclure de façon impliquée.

[+10:30] je regarde la signification de « Et Fugit Irreparabile Tempus ». « Et le temps fuit irréparablement ».

[+13:15] En attendant, je participe à la traduction de certains sites de FR vers EN et inversement pour Google.

[+33:10] Mise à part Nokia, rien de particulier jusque-là. Ai obtenu une médaille à la con pour ma participation aux traductions Google. Me sens un peu différent, mais rien de vraiment notable. Vais tenter de trouver une activité dérisoire (du genre Solitaire ou Freecell). La (dernière) bière commence a perdre ses bulles, je vais la finir vite.

[+40:19] Petit vertige, mais beaucoup d'ennui.

[+45:54] On en est à 5:10 de Spektr, et c'est très bon. Mais concernant le carton, rien de notable.

[+48:02] Pour ne pas gâcher la première moitié, je vais prendre la seconde. Done.

[+50:39] Putain que je m'emmerde. je vais faire un tour dehors pour stimuler le tout. À noter que ce n'est pas quelque chose que je ferais sobre, l'effet est donc présent bien que non notable. À noter que l'alcool est quand même assez présent, et que je dois aller uriner.

[+54:27] Toujours pas parti, je me roule une cigarette.

[+57:20] Ai remis Spektr à 11:00, sans le mettre sur lecture, le passage à l'air enchanteur. Pars pour quelques minutes en extérieur après avoir roulé ma cigarette, et pris quelques feuilles pour le trajet, au cas où. Le tabac sent fort, presque mauvais. Vais tenter de ne pas réinitialiser le chronomètre du téléphone pendant le trajet, ne sachant pas comment en sortir.

[+1:29:55] De retour à la rméaailsiotné, sans aucune espèce de sentiment de bien-être, ni de mal-être. Un fond d'inutilité peut-être, mais rien de plus que ce qui m'envahit la plupart du temps.

[+1:34:01] Penses à une amie pour qui ce journal pourrait être intéressant. je considère lui montrer.

[+1:36:07] Spektr valait le coup d'être mis en attente à 11:00. Coup de fatigue, dommage.

[+1:37:25] Hésite à remettre un 0 devant tous les temps n'ayant pas atteint l'heure, par souci de formalisme.

[+1:41:58] Commence à obtenir, en fixant les murs, quelques hallucinations, en tout cas de forme et de superposition. En étant à Spektr – Et Fugit Irreparabile Tempus – 22:09

[+1:43:32] Tous ces sentiments de peur me paraissent tellement lointains, si dérisoire par rapport à mon ressenti actuel. Les stéréotypes mis en œuvre dans Spektr actuellement sont excellents, mais tellement liés à une représentation sociale prédéfinie que je ne m'y retrouve aucunement. je ne suis pas leur son.

[+1:46:40] L'atmosphère devient plus chaude, et j'ai de plus en plus la paresse de noter les secondes lors de l'entrée. je ressens plus le besoin du flux continu, en oubliant le temps. Mais ce serait digresser sur le protocole mis en œuvre (non volontairement d'ailleurs) depuis le début de cette prise.

[+1:48:48] À noter que je n'ai toujours pas altérer les précédentes entrées selon un formalisme précis concernant les heures.

[+1:49:49] Il y a un point au dessus de mon écran qui ressort d'avantage. Il doit être issu d'un trou de punaise ou quelque autre clou, mais présente un relief si intense que je ne peux voir que lui lorsque je tente de contempler le bruit visuel environnant le mur surplombant mes écrans.

[+1:51:51] Outre le pattern intéressant des heures sur les deux dernières entrées, je me rappelle une réflexion que je me suis faite il y a peu sur la perception sous LSD étant une accumulation de détails sur les stimuli ; c'est-à-dire : lorsque je regarde un motif abstrait, je le conçoit mais en quelques instants le raffine jusqu'à ce que tout contour soit le plus net possible. En cela, je montre que la perception n'est jamais que cela : un raffinement de préjugés. Nous passons notre temps à se faire des idées présupposées du monde (sans quoi nous ne pourrions même l'appréhender), car nous ne fonctionnons que par reconnaissance de forme. Ces « formes » peuvent s'identifier au concept de « processus », dans le sens où lorsque nous reconnaissons une situation, nous réagissons par une reproduction de situation de réaction similaire à celle que nous aurions eu dans une situation similaire. (Concernant les contours, pour finir le raisonnement ayant lancé l'étincelle, la méthode d'intégration de la connaissance est très fortement assimilable à celle des grapheurs résolvant par quadtree, ou octree en trois dimensions.)

[+2:01:21] (je ne pensais pas atteindre les deux heures.) Le LSD ne nous montre rien que l'on ne se soit pas évertué à cacher le plus souvent. Par l'intermédiaire de perceptions non-altérées, nous devenons lucides sur nos propres envies de perception. Pas sur la perception même, car celle-ci est (par définition) inaccessible, car définie par elle-même.

[+2:04:41] Gros Kick in. Le LSD est là, plus de doute. Il est là depuis longtemps je pense, mais entre l'alcool et ma prédisposition aux délires égocentriques et mystiques, l'un pouvait en douter. Je viens de me rendre compte avec un plaisir non caché que l'heure actuelle (02:03) correspond à peu près au décalage concernant le début de ma prise, indiquant celle-ci aux alentours de minuit.

[+2:07:28] je regarde les visages apparaissant dans les méandres abstraits des textures de mes murs. Avant, je les acceptais, comme ça. Maintenant, je veux savoir qui ils sont.

[+2:09:09] À chaque mouvement d'œil, les contours sont « flous » (c'est-à-dire comme sobre) et se raffermissent, encore une fois comme ce que ferait une IA de reconnaissance d'image. Le raffermissement des contours de manières extrême associée au mélange de symbole présupposés est le premier pas vers une perception communicable.

[+2:12:25] Les vagues que je vois dans les murs ne sont que des représentations des mouvements de mes yeux, incapables pour une fois de se concentrer sur une chose précise. Conséquence directe : illusion de vague sur le mur par persistance rétinienne. En plus de la représentation « mouvante » de l'incapacité de percevoir le propre mouvement de mes yeux, mon cerveau éditeur, c'est-à-dire celui qui me fait croire que lorsque je regarde un film je vois du mouvement, celui qui me fait croire que lorsque je crois qu'un ami a dit quelque chose qu'il n'a pas dit alors que nous sommes tous deux persuadés que l'autre se trompe, celui qui me montre de la couleur pour pallier le mouvement, celui qui me montre du mouvement pour pallier le contraste, mon cerveau éditeur disais-je me montre ce qu'il veut, c'est-à-dire ce que je veux. Et devant cette constatation de soi, je ne peux qu'avoir ma bouche bée, contemplant comme dans un miroir le reflet de mon ego.

[+2:22:11] Vais me chercher un verre d'eau.

[+2:22:45] En ai trouvé un plus vite que prévu. À noter que musicalement, nous sommes passé à l'album Cyper, toujours de Spektr, et que nous sommes à l'emplacement 15:24.

[+2:25:22] L'oscillation de la saturation, notamment de l'ambiance rouge (ou chaude), est un phénomène plaisant.

[+2:27:34] Pour l'instant, cela semble suivre l'habituel, c'est-à-dire que le visuel prend place en ignorant totalement le sonore, si ce n'est en univers latent. Plus tard, il me semble me rappeler que l'inverse se produit, et l'univers sonore deviendra le gouffre, et le visuel la décoration. Le son sera le puits, le visuel en sera le bord.

[+2:30:46] Il est dur de ne pas se laisser engloutir par la contemplation. je tenterai de garder si ce n'est une entrée fréquente, au moins régulière.

[+2:33:13] Les visions sont très fortes. je remarque (à nouveau) que ce sont bien les contours qui sont à l'origine de la genèse de formes, et que la superposition de ces contours – notamment dans ma vision périphérique – est sujette et l'affabulation. Si fantasme exister il doit, il est beaucoup plus pur que toute interprétation psychologique ayant un lien avec le sexe, l'inceste, le cannibalisme, la mort, ou autres préoccupations sociales ; ces préoccupations sont pures, uniquement axées sur le soi, sans aucune altération de volonté de représentation.

[+2:37:32] Sensation de redescente. Apparente sûrement, mais les visuels sont moins présents. La musique n'aide pas, nous en sommes à 29:20 de Spektr – Cypher, alors ça peut plomber.

[+2:39:43] Mon état d'esprit a un impact impressionnant sur mon état d'esprit à l'instant t+1. Oscillation permanente, c'est la caractéristique du LSD. je ne regrette pas d'avoir noté ce sentiment de redescente, il y a pourtant seulement quelques secondes qui me paraissent des éternités. Et grosse pétée dans ta gueule, ne serai-ce que pour se venger peut-être. Boom. Je n'ai toujours pas bu dans ce verre d'eau.

[+2:43:21] Percevoir les détails avec autant de précision en est presque douloureux pour le cerveau. Se voir raffiner chaque contour jusqu'à son moindre micron est un effort cérébral intense.

[+2:48:26] Ce sentiment étrange de souffrir pendant que l'on regarde, et pourtant n'avoir envie que de cela est un des moments les plus antagonisants de l'expérience. Vouloir plus, tout en voulant fermer les yeux, sans vouloir le faire non plus.

[+2:48:44] Les visions du LSD viennent de deux choses : de la persistance rétinienne, et de l'incapacité à garder les yeux immobiles. De ces deux choses découlent les illusions tant appréciées lorsque nous « fixons » une texture. Cette perception, alliée à notre « capacité » (si ce n'est notre incapacité à ne pas le faire) à reconnaître des modèles et des patrons et à s'en servir pour nous représenter la réalité, nous permet de nous percevoir nous-même, du fait de pouvoir se donner une image de ces patrons mêmes. En acceptant l'idée de ne pas être un point fixe, mais uniquement défini par notre expérience mouvante et notre application de cette précédente expérience, nous recherchons le point originel duquel nous avons émergé, sans pouvoir l'atteindre, car il n'est accessible sans remettre en cause soit notre existence entière, soit notre sanité d'esprit.

[+2:56:01] Suis curieux de voir ma mydriase.

[+2:56:56] Concrète. Contexte : Aklhys – The Dreaming I

[+2:57:49] Viens de réaliser que ma dernière bière n'était pas vide. Cela doit bien faire plus de deux heures qu'elle est en attente.

[+2:59:06] Petit effet de redescente, assez désagréable, car ai l'impression que c'est un des derniers.

[+3:00:40] Les effets sont plus présents vers les lumières. Je pense avoir eu une dilatation des pupilles en regardant le mur.

[+3:02:00] Autre effet désagréable de redescente : je pense à des choses et des gens auxquels je n'ai pas pensé depuis trois heures.

[+3:03:30] Bien qu'étant tout à fait conscient que ces « prises de conscience » et ces sentiments de redescente soient aussi englobés de LSD, il est difficile de départager entre le sentiment de descente faux, et le sentiment de remontée faisant réinterpréter les précédents sentiments comme étant faux. En attendant, le tout est très agréable, et jamais conflictuel au point de me sentir mal. Conflictuel dans le savoir, mais pas dans le ressenti.

[+3:06:41] La plupart de mes visions auront gravité autour de ce trou de punaise.

[+3:10:09] Pour l'entrée, mais rien à dire.

[+3:11:50] Même lorsque tout est oppressant, c'est quand même confortable. Parce que c'est sa propre oppression. Et celle là, elle ne fait jamais peur.

[+3:17:11] Autre observation : en oscillant à une certaine distance du mur, d'avant en arrière, j'ai constaté un sentiment de gonflement de la texture du mur. Encore une fois, persistance rétinienne et interprétation de mouvements supposés (qu'ils soient amplifiés, ou au contraire contrés) sont à l'origine de ces hallucinations.

[+3:20:05] Les effets commencent à être plus auditifs et moins visuels.

[+3:22:16] Ai mal au corps. Une descente de plus ?

[+3:24:32] Peut-être, mais pas fini en tout cas.

[+3:27:27] Il était dur de s'extraire de cette chute sans fond vers le soi en contemplant sur fond flou un bord de table.

[+3:34:15] Contemplation un peu sociale, je repense à des situations et des gens extérieurs à ce délire. Désagréable.

[+3:41:10] Après avoir passé toutes ces minutes dans un trou noir (littéralement, bloqué devant mon fond d'écran représentant un trou noir), je commence à avoir des envies corporelles (faim, fatigue notamment).

[+3:48:50] Les effets s'estompent tout de même. Écoute de la noise, et vais manger du chocolat. Ai même envie de m'occuper.

[+3:50:50] La descente ma paraît trop abrupte, peut-être est-ce encore une illusion.

[+3:52:14] j'arrive encore à rester bloqué devant un mur plus de deux minutes, et ce que je commence à appeler descente maintenant n'est peut-être que ma volonté de descendre. Laissons-nous le temps, et remettons de la musique.

[+3:55:17] N'ai toujours pas restructuré le format des timestamps de cette soirée, mais ai par contre bu un peu d'eau.

[+4:02:40] Prends plus de temps pour faire une entrée. En ai moins la motivation. Écoute Ancient Moon – Vvltvr, avec plaisir.

[+4:04:54] Ma persistance rétinienne est beaucoup plus faible, et ma réaction sensorielle beaucoup plus rapide. je ne ressens presque plus cet effet de délai multi-sensoriel. Les plongeons introspectifs sont encore possible, mais si provoqués, et commencent à se rapprocher de situations plus quotidiennes.

[+4:07:07] Vais stopper ici, à plus de quatre heure de la prise, heure à laquelle j'étais pourtant dans un état d'ivresse peu souhaitable. je n'ai pas l'impression d'avoir gâché ma nuit, mais pas non plus de l'avoir utilisée à son maximum. D'en avoir ici le récit me donnera peut-être quelque divertissement.

[+4:17:39] Ai relu le journal de bord. Intéressant. N'ai toujours pas fini ma bière.