Brouillons de pensées

Localisation

Dire que les pensées sont dans le cerveau est un fait largement accepté, mais qui a sûrement été accepté trop vite. Ce qui nous pousse à croire que nos pensées sont dans le cerveau, c'est la position de nos yeux et de nos oreilles.

Si nos yeux avaient été sur le thorax, et les oreilles dans les mains, trouverions-nous que la pensée étant dans le cerveau soit un fait aussi évident ?

Notre imagination visuelle n'est peut-être pas dans notre cerveau, mais dans notre rétine. Lorsque l'on se rappelle une musique, on se la rappelle dans les oreilles. Nous ne sommes capables de nous représenter spatialement nos pensées qu'en les projetant vers nos sens. C'est là l'atout principal du cerveau. Et c'est de cette faculté bien précise que nous avons pu développer un des outils les plus utiles : s'entendre penser. La pensée (en tant que discours) est un raccourci permettant de relier directement la sortie initialement prévue pour la bouche à l'entrée auditive, d'où le terme « réflexion ». Lorsque l'on pense, on parle et on entend à la fois, sans totalement faire ni l'un ni l'autre. C'est ce qui permet de penser vite, si ce n'est parfois de façon confuse, et cela a sûrement présenté un avantage non négligeable pour la survie.

Un autre élément nous pousse à localiser la pensée dans le cerveau : c'est l'activité électrique de celui-ci lorsqu'il est soumis à un stimulus. Mais croire que notre pensée est identique à l'activité électrique revient à accepter la théorie de l'identité esprit-cerveau, qui présente des inconvénients majeurs sur la description de ce qu'est une sensation de douleur dans le cerveau, ou sur la détermination d'un pattern électrique pouvant représenter la notion de bleu.

Il ne faut évidemment pas nier la fonction du cerveau dans le processus de perception, mais localiser celle-ci dans le cerveau – encore faut-il que la localisation de perception ait un sens –, est un choix qui n'est pas si évident.